“Tannhäuser” de Wagner à la Fenice, version Calixto Bieito

Une fois par an, le théâtre la Fenice propose un spectacle lyrique d’une œuvre de Wagner en hommage à ce compositeur extraordinaire qui aima Venise au point d’y passer la fin de sa vie. Cette année, après vingt ans d’absence, Tannhäuser retourne sur scène.

Crédit photo: Hélène Sadaune

Cette fois le chef d’orchestre choisi est Omer Meir Wellber qui le dirige avec talent et sensibilité. Il nous dit : « Je me confronte à Tannhäuser pour la première fois et il ne s’agit pas d’une œuvre de répertoire réalisée souvent (sous entendu à Venise). Mais du point de vue de la conception du son, celui de la Fenice est le plus allemand de tous les orchestres italiens et ceci a été un excellent point de départ. Wagner en outre est un compositeur que le théâtre vénitien a affronté plusieurs fois. Ensuite, plusieurs de nos interprètes sont des chanteurs lyriques allemands »   ce qui a donné une partie musicale très réussie.

Mais la direction de la mise en scène a été confiée à Calixto Bieito, qui avait déjà signé à la Fenice sa version de Carmen, réduite par lui à la reine des « Grognasses » (rien à voir ô combien hélas, avec la célèbre femme fatale tant aimée). Cette fois ci, rebelote, il réalise une version très ordinaire où la violence et la trivialité régne.

Une mise en scène quelconque avec un visuel des plus insipide, alors pour pimenter le tout, à défaut de talent, il « agréemente » son spectacle de scènes de sévices, sa signature en quelque sorte.

Fondazione Teatro La Fenice RICHARD WAGNER, TANNHÄUSER
Direttore Omer Meir Wellber Regia Calixto Bieito
Photo ©Michele Crosera

Je recense : pour commencer, une scène d’auto-érotisme de Vénus esseulée au milieu de la forêt (se frotter ainsi contre les arbres était grotesque), par deux fois,  une scène de passage à tabac de groupe contre une personne à terre sans défense (écoeurant), par deux fois, un des protagonistes est trainé par les pieds sur la scène (sans raison aucune, mais pour faire « trendy » la violence gratuite étant à la mode), la scène où Elisabeth est violée par un groupe d’homme, de nos jours où les tournantes sont communes, est d’actualité ?

Fondazione Teatro La Fenice RICHARD WAGNER, TANNHÄUSER
Photo ©Michele Crosera

Elisabeth est plus tard représentée comme une clocharde pleine de puces se grattant frénétiquement, puis une tentative malsaine d’étranglement d’Elisabeth par son dulciné (clairement , pas dans le texte de Wagner : mais la version navrante de Bieito)… Vous voyez les scènes : c’est comme si on regardait la télé, la même agressivité rampante et la même banalité, puisque désormais, nous sommes sevrés à la violence, Enfant Terrible de notre époque, retransmise partout à toute heure, dorénavant y compris à la Fenice. D’où ma question: les excès et le mauvais goût font partie de nos vies, nous sommes bombardés d’images dégradantes et sordides. Mais devons nous également les retrouver à un spectacle lyrique dans un théâtre par ailleurs de qualité? Pour moi non.

A mon humble avis Bieito est surestimé car il ne repropose que des versions prosaïques de versions déjà existantes et n’y apporte rien de nouveau sinon sa fureur et sa trivialité. 

Je joins des photos pour vous faire partager la platitude des scènes, l’insignifiance des costumes, la banalités des éclairages : que du déja vu, du rebattu, de l’insipide. Il y ajoute de l’agressivité pour faire comme dans un reality show? Lamentable.

Des centaines de metteurs en scènes ont beaucoup plus de talent que ce glorificateur douteux de la plate modernité et de la violence, alors M. Chiarot, donnez-leur leur chance, ils feront certainement des spectacles d’une bien autre teneur que ce Bieito, chantre des non-valeurs de sa triste époque, la nôtre.

Fondazione Teatro La Fenice RICHARD WAGNER, TANNHÄUSER
 Regia Calixto Bieito
Photo ©Michele Crosera – “Zombyland” version Calixto dixit Hélène

 

 

http://www.teatrolafenice.it/site/index.php

Pubblicato da Hélène Sadaune

Master II d'Histoire Moderne de la Sorbonne Paris IV, j'ai travaillé pendant plus de 20 ans pour la C.E. Résidente depuis plus de trente ans à Venise, guide conférencière à Paris et Venise, je suis une passionnée de la civilisation vénitienne et de cette ville hors-norme. Comptez sur moi pour vous tenir informé!

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