Folio S.F. Les agents de Grégoire Courtois

Ce roman dystopique est étrange, saugrenu, kafkaïen, un brin sadique. Difficile d’y accrocher dès les premières pages. Il faudra attendre l’arrivée de Hick (à la page 101) pour que l’absurdité de ce monde prenne une saveur différente, que l’on comprenne que quelque chose va changer dans cet univers où les humains n’ont plus aucun lien avec la nature et se sont réfugiés dans une civilisation violente et artificielle organisée par des robots. Il faut donc continuer la lecture pour l’apprécier dans toute son originalité.

Les agents, des salariés d’un monde vivant dans des buildings, qui ne sont jamais sortis dans la rue, au grand air, dans la nature, sont reclus dans leurs box, façon bureau américain, et surveillent sans les comprendre, des milliers de données qui défilent sur leurs écrans, données sans aucune utilité, mais qui les tiennent occupés toute leur courte vie durant, jusqu’au moment où ils seront tués par d’autres agents qui veulent leur voler leur box, territoire tribal de clans post-urbain.

La réalité est que leur monde tourne sans eux sans qu’ils ne s’en rendent compte, occupés dans des tâches et des luttes inutiles qui dévorent toutes leurs énergies. Les hautes tours de verre d’un autre siècle sont devenues leur lieu de survie, entretenu et alimenté par des robots invisibles. Tous les jours, ils luttent pour conserver leur poste au risque d’être tué, ou encore pire pour eux, destitué de leurs fonctions et jeté à la rue, où ils ne sont jamais allés leur vie durant et qu’ils craignent comme synonyme de mort et de déchéance. Car dehors dit-on (mais personne n’est sorti pour le vérifier) règne l’animalité et l’inconnu. A l’étage 122 de la tour 35S du quartier sud, Laszlo et sa guilde sont prêts à tout pour défendre leur territoire. Jusqu’au jour où se présente le remplaçant d’un agent s’étant défenestré – car nombreux sont les agents qui se jettent des fenêtres pour mettre un terme à leur vie vide de sens. Avec lui, différent de tous les autres remplaçants connus à ce jour, leur univers va-t-il enfin changer?